Construire sur l’eau

Auteur :

Franco Mancuso

Les solutions surprenantes qui ont fait naître Venise, et l’ont fait croître.

  IL EN VA DE MÊME DE TOUTES LES VILLES : si l’on veut en com- prendre le sens, il faut parcourir à nouveau l’itinéraire de leur formation et considérer le territoire qui les a fait apparaître et les a façonnées.

À Venise, la difficulté s’accroît ; car à Venise, le territoire, c’est l’eau : l’eau des fleuves, l’eau de la mer en perpétuelle opposition, l’emportant tour à tour l’une sur l’autre, du moins jusqu’au moment où la Lagune se met à connaître une certaine stabilité de formes et de fonctionnement, conséquence des interventions réa- lisées par la Sérénissime. Ce qui se produit quand la ville est déjà là tout entière — à partir du XIVe siècle — : quand tout ce qu’on fait pour régler l’action des eaux sert à la sauver des risques d’une disparition soudaine.

Il n’y a pas à Venise, comme on en trouve ailleurs, de terrains solides où lire les traces des origines, identifier les formes des implantations qui se sont succédé dans la longue durée : pour la ville, on doit se fier à des témoignages et des documents d’archives, ainsi qu’à quelques découvertes archéologiques ; pour la Lagune, aux découvertes éclairantes de l’archéologie sous- marine. Si les sources n’existent pas toujours, il reste Venise, qui permet d’échafauder des hypothèses sur sa physionomie initiale et les processus de sa formation urbaine, et de découvrir com- ment ceux qui bâtirent peu à peu cette ville résolurent les pro- blèmes rencontrés pour construire des maisons et des ponts, creuser des canaux et consolider des terrains : pour faire d’un marais une ville.