EN RELISANT OVIDE

 

(Traduit de l’italien par Iris Chionne et Pierre Présumey.)

 

… frondere Philemona Baucis,
Baucida conspexit senior frondere Philemon.

Ovide, Métamorphoses, XII.

 

Paul Valéry, 1894.

Baucis à Philémon.

J’avais toujours pressenti que nos jours
n’étaient que des feuilles : leur doux frémissement
pareil à celui de la haie dans le vent
derrière notre chaumière, ou celui des roseaux
sur le bord de l’étang. Et même en moi
je percevais un tremblement comme celui
d’une feuille vibrant à peine sur le mince pétiole,
quand tu rentrais, mon amour,
de notre pauvre jardinet, en rapportant
les quelques fruits, pour notre subsistance,
mûris par tes soins assidus
au rythme des saisons calmes : au printemps
l’éclosion tendre, en été la grande croissance
et en automne la plénitude rouge