MILIEU ET AMBIANCE (I)

 

ON s’était promis depuis longtemps de revenir à Spitzer, du moins à un versant de son œuvre, celui de la sémantique historique. Non que l’on n’ait pas gardé un souvenir précieux des Études de style, savantes et délectables, où la finesse de l’analyse composait avec la vigueur de la polémique. Spitzer était doué d’une ouïe littéraire d’une extraordinaire acuité ; dans ce volume des Études de style, la longue analyse de l’« effet de sourdine » chez Racine en témoigne avec éclat. Mais les résultats étaient parfois discutables, et l’économie générale, d’un équilibre précaire. Ce qui paraissait tenir à des habitudes académiques de disputatio portées à quelques excès, qui se donnaient carrière dans un monde très restreint et très artificiel. S’y préfiguraient les emballements d’initiés de la critique française des trente glorieuses : ses « animateurs » ne voyant pas, en somme, que cette effervescence n’était possible qu’à proportion des abondances naissantes. (Il y aurait beaucoup à dire sur de telles coïncidences, et sur les conditions d’invention instrumentale dans les époques techniques : nuançant, dictant même la vie de l’esprit, ou plutôt ce que l’esprit désigne comme la vie à laquelle il consent.) Mais surtout on restait dans ces Études du côté des écrivains individuels et de la personnalité informant un « style », en quoi elles pouvaient faire nombre avec tant d’autres livres de métier, l’attention de Spitzer procédant d’une méthode simplement plus rigoureuse qui gardait à chaque instant le souvenir de l’ampleur des phénomènes de langue.

 
  • mai 2007
    • MILIEU ET AMBIANCE (I) Leo Spitzer

        ON s’était promis depuis longtemps de revenir à Spitzer, du moins à un versant de son œuvre, celui de la sémantique historique. Non que l’on n’ait pas gardé un souvenir précieux desÉtudes de style, savantes et délectables, où la finesse de l’analyse composait avec la vigueur de la polémique. Spitzer était doué d’une ouïe littéraire d’une extraordinaire acuité ; dans ce volume desÉtudes de style, la longue analyse de l’« effet de sourdine » chez Racine en témoigne avec éclat. Mais les résultats étaient parfois discutables, et l’économie générale, d’un équilibre précaire. Ce qui paraissait tenir...

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    • CIRCONSTANCES Christophe Carraud

      Fêtons Mardi-Gras avec nos jeunes le mercredi 21 février. Tract municipal. M. R*** est agriculteur. Agriculteur, pas paysan. Il tient à faire la distinction. C’est un homme de haute taille, au bon sourire. Il a soixante-sept ans. Son père était agriculteur, son grand-père aussi. Le grand-père a fondé la lignée en s’établissant ici avec un pécule issu de ses parents, des paysans d’une tout autre époque qui avaient prospéré dans la Somme. Le pécule était confortable, il avait pu acheterune bonne centaine d’hectares. À moins, dans le Multien et généralement dans la Brie, c’est difficile, ça l’était même en...

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    • APERÇUS DE L'ÉDEN. Le paysage dans la littérature latine du Moyen Âge Jean-Yves Tilliette

      "A DROITE, très nettement, se laissaient voir les monts du Lyonnais ; à gauche, la mer qui baigne Marseille et celle qui bat les remparts d’Aigues-Mortes, dont me séparaient plusieurs jours de marche ; le Rhône lui-même était sous nos yeux. Et comme, en contemplant avec admiration chacun de ces objets, tantôt je savourais la réalité du monde terrestre, tantôt j’élevais mon âme, comme je l’avais fait de mon corps, vers les hauteurs, …je jugeai bon de jeter les yeux sur les Confessions d’Augustin… » (François Pétrarque, Lettres familières, IV, 1, 25-26). Non, décidément, le spectacle des choses...

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    • CONTRIBUTION À UNE CRITIQUE DU « MILIEU » DÉMOCRATIQUE. Une théorie des archipels peut-elle renouveler notre culture politique démocratique ? Christian Ruby

      MALGRÉ QUELQUES AVERTISSEMENTS, proférés ici ou là, portant sur la méfiance à avoir, en philosophie politique, voire en sociologie, à l’égard d’un usage trop mécanique de la notion de « milieu », il semble toujours difficile à beaucoup de penser les phénomènes politiques et les événements historiques, relatifs en particulier au « milieu » démocratique, en termes de processus. Les usages mécaniques des notions prolifèrent jusque dans les opinions de ceux qui n’y ont pourtant aucun intérêt. Ces usages coïncident avec des comportements qui isolent les citoyennes et les citoyens. De ce fait, ces...

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    • DISCERNER LE MILIEU Isabelle Olivo-Poindron

      L’équivocité du milieu : les paradoxes. Que le terme de milieusoit équivoque, la liste de ses usages suffit à l’attester. Que ces significations multiples le destituent de tout sens cohérent, leur analyse oblige à le reconnaître, jusqu’à montrer que l’ambiguïté de fond qui en délite le sens provient de notre incapacité à concevoir correctement ce qu’engage la pensée de la relation. En effet, le mot vise d’abord en français « le lieu également distant des extrémités » (Littré), la moitié d’une droite, d’une surface ou d’un volume ; par extension, il sert aussi à dire la partie moyenne d’une durée, la...

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    • VIES, CIELS Marjolaine Pigeon

        Vie III.Pointe-sèche sur cuivre, 120 x 120 mm, 2004.Vie XIV.Pointe-sèche sur cuivre, 120 x 120 mm, 2004.Vie XI.Pointe-sèche sur cuivre, 120 x 120 mm, 2004.Vie V.Pointe-sèche sur cuivre, 120 x 120 mm, 2004.Vie XII.Pointe-sèche sur cuivre, 120 x 120 mm, 2004.Vie XIII.Pointe-sèche et monotype sur cuivre, 120 x 120 mm, 2004.Vie I.Pointe-sèche sur cuivre, 120 x 120 mm, 2004. CIELS. Herbes.Gouache sur papier japon, 690 x 560 mm, 2005.Ciel X.Huile sur papier japon, 720 x 760 mm, 2006.Ciel XI.Huile sur papier japon, 720 x 760 mm, 2006.Ciel III.Huile sur papier japon, 720 x 760 mm,...

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  • août 2009
    • CETTE DOUCE ARDENTE GRAVITÉ Maxime Deurbergue

      Ceux qui ont passé ne repassent plus Mais je l’avoue je n’ai pas d’inquiétude Pierre Jean Jouve.   C’EST en tremblant, je le découvre, qu’on se risque à écrire des vivants. Les humbles artisans héros de mes recherches ont passé il y a cinq siècles. Il faut peiner dans les archives pour en retrouver la trace, et si de certains je ne connais que le nom, d’autres ont emporté le leur, laissant placidement leurs œuvres sans souci de mémoire, certainement parce qu’ils les pensaient liées davantage à Dieu ou aux saints qu’à eux-mêmes. Sans orgueil ils se sont inclinés devant elles que toute leur vie ils avaient,...

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