DU PAYSAGE À LA « RÉMISSION DE L’ÉPARS »

 

JE vous dois un premier aveu : je suis, depuis longtemps, fasciné par les définitions, qui, tout à la fois, me passionnent et me désespèrent[1]. M’interrogeant sur la cause de cette fascination, il me vient à l’esprit qu’elle pourrait bien être liée à l’exercice de la poésie ; d’une poésie vécue comme un système ouvert, non figé. Je tiens, en effet, le poème pour un acte d’appropriation, qui transcende le vocabulaire et s’inscrit, de ce fait, dans les intervalles, dans les marges des acceptions acquises, voire à l’intersection de certaines d’entre elles. Il navigue ainsi entre différents sens (sans prétendre au demeurant résoudre la question du sens) ; avec cette conséquence que, pour ce qui me concerne, il ne sera jamais autre chose qu’une proposition dont la précarité s’accommode mal des certitudes usuelles. (Tout le contraire, en somme, d’un discours rationnel et précis, se référant à des concepts clairs et présumés sûrs, dont ma vie de juriste aura longuement fait l’expérience ambiguë.)

Mais, je m’égare déjà. Ce que je voulais dire est qu’on ne peut passer de la poésie au discours sur la poésie, en évoquant la relation de cette dernière au paysage (puisque tel est le sujet de ce séminaire) sans faire de l’ordre dans les définitions — ce qui, à l’usage, s’avère plus compliqué, mais, je crois aussi, plus fécond qu’il n’y paraît, de prime abord.