Présentation.
DE quelle religion sommes-nous encore capables ? Sommes-nous seulement encore capables de religion ? S’il est vrai, comme ont encore pu le dire au XXe siècle, dans des horizons de pensée très différents, aussi bien le philosophe Alain1 que le poète Thomas Stearns Eliot2 ou encore le théologien catholique Josef Pieper3 , qu’aucune culture n’est jamais apparue et ne s’est jamais développée en dehors d’une reli-gion, qu’entre la culture et le culte les liens ne concernent pas uniquement les mots et leur origine étymologique, alors, nous qui vivons désormais dans la situation, parfois inquiétante 4, d’une déliaison inédite entre culture, culte et religion, nous sommes confrontés à des problèmes redou-tables dont il n’est pas sûr que nous soyons capables de prendre toute la mesure.
À sa manière, le philosophe britannique Michael Oakeshott (1901-1990), encore peu lu en France, auteur pourtant de deux ouvrages importants de la pensée philosophique du XXe siècle — Experience and its Modes en 19335 et On Human Conduct en 19756 —, a tenté d’affronter ces problèmes. En particulier dans des textes de jeunesse, explicitement consacrés à la question de la religion et de la vie reli-gieuse, et notamment dans un texte de 1929 intitulé « Religion and the World »7 .