JE SUIS L’OCCIDENT : parce que j’appartiens à ce type d’homosexuels qui ont fourni le modèle de l’Image comme objectif du désir — ou parce qu’en tant qu’individu unique et singulier, je tends à me protéger de ce qui m’affecte en recourant à sa transposition en image. Si mon père meurt, je deviens soudain spectateur d’une « mort du père ». L’Europe ne se transforme-t-elle pas en un continent de spectateurs ?
Plus que l’Occident, je suis peut-être le Vieil Occident, celui qui n’a pas de pouvoir. Mais il suffit que je me transporte en Tunisie, et j’en ai énormément — je suis le touriste qui collectionne des émotions en sortant son portefeuille. Peut-être aussi quand je ne suis pas en Tunisie. Je suis l’Occident parce que j’ai appris comme lui à être le touriste de moi-même. Si l’on me menace, j’élève une barrière et ne laisse personne arriver jusqu’à moi. Je préviens les conflits en paraissant généreux et tolérant, en montrant à mon rival qu’il doit devenir comme moi.